Les Soudanais refusent le coup d’État dans la rue, la communauté internationale fait pression

Le coup d’État au Soudan, avec l’arrestation par l’armée des dirigeants civils et la dissolution des organes de la transition, suscite une vive inquiétude dans le monde. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a réclamé la libération « immédiate » du Premier ministre Abdallah Hamdok ; Washington a réclamé le « rétablissement » des institutions.

Avec notre correspondant à Khartoum, Eliott Brachet 

À Khartoum et dans tout le pays, les manifestants n’ont pas attendu que la communauté internationale réagisse.

Nous supportons la transition démocratique. Les autorités ont signé un accord constitutionnel qui les y engage. Nous nous opposerons à toute tentative de ne pas le respecter. Nous attendons un gouvernement civil, élu, rien d’autre.

Colère dans la rue après le coup d’État

Cette nuit, malgré le couvre-feu, de nombreux Soudanais hérissaient des barricades dans leur pâté de maison. Pour eux, le destin du pays se joue ici, dans les rues, alors que dans la soirée, des arrestations de militants étaient toujours en cours et que des pick-up chargés de soldats patrouillaient dans la capitale.

Répression

Certains militants ont trouvé des moyens détournés pour se connecter aux réseaux sociaux, des scènes de lynchages et d’humiliations ont inondé les fils d’actualité : des vidéos de femmes rouées de coup en pleine rue par des soldats descendus de pick-up, des étudiants de l’université de Khartoum couverts d’ecchymoses, cheveux rasés après avoir été frappés jusque dans leur chambre à coucher.

Face à une répression féroce, les manifestants scandaient lundi que leur révolution resterait pacifique. À minuit, une source au sein du ministère de la Santé dressait le bilan provisoire de la journée : sept morts et 140 blessés, rappelant qu’il pourrait très vite s’aggraver alors que de nombreux Soudanais semblent prêts à tout pour faire échouer ce putsch militaire. L’Association des professionnels soudanais, les comités de résistance ainsi que de nombreux syndicats ont appelé à la désobéissance civile et à la grève générale. C’est la même stratégie qui avait été adoptée en juin 2019, juste après le massacre orchestré par des soldats sur le sit-in du quartier général de l’armée.

« Les balles ne tuent pas. Ce qui tue, c’est le silence imposé au peuple ! »

Tard dans la nuit, alors que les communications n’étaient toujours pas rétablies, certains s’époumonaient encore : « Les balles ne tuent pas. Ce qui tue, c’est le silence imposé au peuple ! »

Sur les réseaux sociaux, les manifestants de lundi ne sont pas du tout découragés par la violence de la répression. Au contraire, ils s’organisent et, pour cela, ils ont besoin de temps. On voit ici et là des photos de barricades qui bloquent les rues de différents quartiers de la capitale, c’est ce que les manifestants appellent le « tetris », une sorte de stratégie de guérilla urbaine pacifique, le temps que les forces civiles s’organisent et prévoient une plus grande manifestation dans les jours qui viennent.

À Khartoum, on est toujours sans nouvelles du Premier ministre Abdallah Hamdok et de la plupart des représentants civils détenus par l’armée depuis lundi matin dans un lieu inconnu. Le Conseil de sécurité de l’ONU doit tenir, ce mardi 26 octobre dans l’après-midi, une réunion d’urgence à huis clos.

RFI

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