M5 – RFP: la déconfiture

Après trente heures de réverbération, le ou un Mouvement du 5 Juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP), au bord de l’implosion, est finalement parvenu à surfer sur les contradictions internes désormais clairement affichées, pour pondre une déclaration sous la seule signature du Dr Choguel K. MAIGA. Au-delà, du formalisme, les clivages au sein de la contestation semblent désormais aussi nets qu’insurmontables. Séparation à l’amiable ou simple querelle de ménage ?

Même si on a tenté ces derniers jours d’étouffer les éclats de voix, la compilation des esclandres dénote d’une déconfiture déjà poussée qui pourrait sonner le tocsin d’une aventure qui aura eu le mérite de secouer le cocotier IBK, et ses camarades du syndicat des chefs d’État de la CEDEAO.

Le plaidoyer pro domo
C’est dans avec une énergie du désespoir que le Dr MAIGA qui ne peut convaincre qu’il est désormais le seul dont la parole engage le Mouvement plaide pour sa propre et seule chapelle. En effet, tandis que l’Imam et ses troupes de la CMAS se démarquent des casseurs, appellent les manifestants au calme et à la retenue et prônent un sursis à la désobéissance civile jusqu’à la fin du mois dans le cadre de la préparation de la fête de Tabaski, la plus grande fête musulmane du Mali, le président par intérim du FSD signe seul un Communiqué au nom l’ensemble du M5-RFP pour appeler ‘’le Peuple malien à demeurer mobilisé et déterminé pour la mise en œuvre de son droit constitutionnel à la désobéissance civile, sur l’ensemble du territoire national et dans la Diaspora, jusqu’à l’aboutissement du combat patriotique pour un Mali démocratique, républicain et laïc, et pour le bonheur des Maliens’’.
Présageant le Waterloo, le Dr Choguel MAIGA, dans une fuite en avant qui ne lui ressemble pas, fait dans le déni et requiert par dépit contre la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest qu’il accable de tous péchés d’Israël ! Demi-vérité, contre-vérité sous habillage émotionnel ou simple oraison funèbre du M5-RFP ? Il ne restait à Choguel, dernier porte-parole du M5-RFP, que de dire : An ma yafa CEDEAO ma !

Bisbille sur la nature
de la crise
Dans le communiqué rendu public ce lundi 20 juillet, le Mouvement du 5 Juin-Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) dit regretter que ‘’la Mission de médiation de la CEDEAO sur la résolution de la crise socio-politique continue de croire que la crise malienne se résume au seul contentieux électoral du deuxième tour du scrutin législatif, et non à un problème plus global de gouvernance dont la mauvaise organisation des dernières élections n’est qu’une des multiples manifestations’’.
Pour des hommes et des femmes qui veulent chasser le Président IBK et qui aspirent à diriger le Mali dans l’honneur et la vérité, l’affirmation est légère et ne flatte pas la dignité de notre peuple. Peuple qui ne vit pas ex nihilo, mais dans une communauté sous régionale et régionale. Toutes choses qui devraient lui imposer droiture, vérité et courtoisie. Or, tenter de faire croire aux Maliens que la CEDEAO réduit notre crise à sa seule dimension électorale n’est pas la vérité et n’honore pas notre pays, notamment les responsables du M5-RFP.
En effet, dans le communiqué final de la Mission de bons offices de la CEDEAO (disponible sur tous les supports) on peut lire (écouter) : ‘’à l’issue des différentes consultations avec toutes les parties prenantes, la Mission a noté que les problèmes de la crise sociopolitique s’articulent autour des questions de gouvernance ainsi que des points déjà soulevés par la Mission ministérielle de la CEDEAO du 18 au 20 juin 2020’’.
Donc, en plus du contentieux électoral du deuxième tour du scrutin législatif, la CEDEAO pense que les raisons de notre crise sont aussi à rechercher dans la mauvaise gouvernance (dont l’Imam s’est fait le dénonciateur attitré) et d’autres points évoqués par la Mission ministérielle de la CEDEAO du 18 au 20 juin 2020. Que dit cette mission ?
Elle ‘’a noté la convergence de vue de tous les acteurs maliens sur les nombreux défis auxquels le Mali est confronté, notamment le défi sécuritaire, sanitaire (Covid-19) et économique et la nécessité d’œuvrer, de toute urgence, à sortir le pays de la situation actuelle.
La mission a rappelé qu’il est donc important d’éviter une autre crise qui engendrerait des complications additionnelles’’.
En d’autres termes moins diplomatiques : notre pays est confronté à une triple crise sécuritaire, sanitaire et économique à laquelle, la CEDEAO nous conseille de ne pas ajouter une crise politique.

Le parfait bouc émissaire
Dans le même communiqué, le président du MPR fait dire au Comité Stratégique du M5-RFP ‘’que le combat du mouvement est de sauver le Mali menacé de disparition en tant que Nation, Démocratie et République. Et, Monsieur Ibrahim Boubacar Keïta qui porte l’entière responsabilité de cette sinistre perspective pour notre Pays, doit, par conséquent, démissionner avec son régime’’.
Voulant faire porter à la CEDEAO le chapeau de l’échec de l’insurrection ouverte pour faire partir le Président IBK, le Dr Choguel affirme : ‘’le Communiqué de la Médiation reste muet et laisse sans réponses les attentes et aspirations profondes du Peuple malien’’. Choguel n’est peut-être pas un diplomate de formation, mais c’est un homme d’État, rompu aux arcanes des relations internationales pour avoir été négociateur en chef dans la bataille du coton africain à l’OMC. Aussi, il ne peut ignorer que les relations internationales ne sont basées sur des oukases, mais des rapports de force.
La CEDEAO n’est pas venue nous braquer avec des armes pour imposer quoi que ce soit. Le Comité Stratégique du M5-RFP devrait avoir l’obligeance morale et l’honnêteté malienne de dire aux Maliens que la CEDEAO, contrairement à la complainte choguelienne, ne nous a rien imposé. Qu’elle n’est pas restée muette et qu’elle a bel et bien répondu par la négative à un projet putschiste du M5-RFP qui consiste à vouloir ‘’faire démissionner le Président, par la force, pacifiquement-démocratiquement’’ selon l’expression de Issa Kaou N’DJIM. Voici ce qu’elle dit au point 7 de son communiqué final du 19 juillet 2020 : ‘’la Mission rappelle également l’importance et la nécessité du respect des Institutions de la République notamment les voies constitutionnelles pour l’accession au pouvoir et ce, conformément au Protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance de la CEDEAO. Aucune forme de changement non constitutionnel d’accession au pouvoir ne sera acceptée par la CEDEAO’’.
8. ‘’En outre, la Mission encourage toutes les parties prenantes à recourir au dialogue et aux négociations pour résoudre cette crise socio-politique, dans la bonne foi et la confiance mutuelle, pour le maintien de la paix et de la sécurité dans le pays’’.
Surmenage passager ou mauvaise foi de la part du M5-RFP ? En tout cas, ce qui est dit ici ne souffre d’aucune espèce d’ambiguïté.

Le préalable
de la CEDEAO
Dans son communiqué daté du 19 juin dernier, la CEDEAO on ne peut plus claire dans le cadre des intérêts du Mali mais aussi de la sous-région, s’est dite ‘’disposée à se porter garante du respect des décisions et recommandations précisées aux paragraphes 10 et 11 ci-dessous afin de trouver une issue à la crise qui préserve la paix et la stabilité du Mali et de la sous-région.
Dans ce contexte, la Mission rappelle l’importance du respect des Institutions de la République, fondement de la stabilité du pays’’.
En français facile : nous sommes prêts à vous aider à trouver une solution à votre problème si vous acceptez comme préalable le respect des institutions (ce qui s’oppose à toute tentative ou revendication de prendre le pouvoir par la rue).
Si oui, voici nos propositions :
‘’10. La Mission note que l’Arrêt rendu par la Cour Constitutionnelle cadre du contentieux des dernières élections législatives est à la base de la crispation socio –politique actuelle. Elle invite donc le Gouvernement de la République du Mali à reconsidérer les résultats de toutes les circonscriptions ayant fait l’objet de révision par l’Arrêt de la Cour Constitutionnelle. De nouvelles élections partielles pour les circonscriptions concernées devraient être organisées dans les meilleurs délais.
11. En outre, la Mission insiste spécifiquement sur la nécessité de :
12. a) œuvrer pour le rétablissement d’un climat de confiance renouvelée entre les parties maliennes ;
b) éviter la violence comme moyen de règlement de crise et privilégier le dialogue;
c) préserver les Institutions de la République afin de maintenir la stabilité du pays et d’éviter le chaos institutionnel aux conséquences imprévisibles et désastreuses pour la paix et la stabilité du Mali et de la sous-région ;
d) mettre en place un Gouvernement consensuel d’union nationale tenant compte des recommandations du Dialogue National Inclusif ;
e) accélérer la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger ;
f) poursuivre résolument la mise en œuvre des conclusions du Dialogue National Inclusif ;
g) mettre en œuvre les réformes prévues concernant la Constitution et le Code électoral; et
h) envisager une relecture des textes régissant la Cour Constitutionnelle’’ (extraits du communiqué de la Mission ministérielle de la CEDEAO du 19 juin 2020).

Qui peut
n’empêche pèche
Voici ce que la CEDEAO a proposé depuis un mois jour pour jour. Le Comité stratégique du M5-RFP, plus pléthorique que tactique, le savait. Il savait que la CEDEAO a clairement dit qu’elle n’acceptait pas le départ d’un président en fonction en dehors des voies constitutionnelles, mais malgré tout il a continué à aller discuter avec elle espérant lui arracher un blanc-seing pour un pronunciamiento ! Pourquoi sachant ces dispositions les leaders du M5-RFP n’ont pas refusé la Médiation de la CEDEAO ? Qui peut n’empêche pèche !
Facile aujourd’hui de baver sur Jonathan Goodluck dont l’échec est vérité celui du M5-RFP ; un M5-RFP qui a échoué à faire adhérer sa médiation à un projet putschiste.
Ndon na ma fin ta, don baliya a kagni o yé ! (je ne suis entré, je n’ai rien pris, il était préférable de ne pas entrer). Ne pouvant se prévaloir de sa propre turpitude, le M5-RFP ne peut s’en prendre alors qu’à lui-même. Car rien ne l’obligeait à accepter la médiation.
Maintenant, le vin est tiré, le M5-RFP va devoir le boire jusqu’à la lie : ‘’La CEDEAO va immédiatement mettre en place un comité technique pour assurer le suivi de la mise en œuvre des recommandations. Ce comité sera composé des Représentants du Gouvernement, du Parlement, de la Société Civile, de la Magistrature, des représentants des femmes et des jeunes et de la Représentation de la CEDEAO au Mali ‘’.

Voilà, le M5-RFP celui qui s’autoproclame seul représentant légitime du peuple à l’intérieur des frontières nationales se met à pleurnicher comme une fiotte parce qu’il est esseulé ! Si tant est vrai que le peuple est avec lui, pourquoi s’en préoccuper au point d’en faire un casus belli avec nos voisins de la CEDEAO qui ont eu l’amabilité diplomatique de dire qu’ils ne se laisseront pas trimbaler par des putschistes même drivés par un très éclairé et très respecté Imam.
Maintenant, à part les magistrats qui ne figurent pas aux points 1 à 3 du communiqué, le M5-RFP a du mal à citer d’autres parties prenantes qui disent être en désaccord avec la CEDEAO.
Le Comité stratégique du M5-RFP au nom duquel le Dr Choguel s’exprime peut en effet reprocher beaucoup de choses à la Mission de la médiation conduite par l’ancien Président nigérian Goodluck Jonathan comme sa partialité et sa connivence avec la Majorité ! C’est de bonne guerre ! Sauf que le M5-RFP est obligé de noter avec tout le monde que cette Majorité n’a été reçue qu’une fois tandis que le M5-RFP l’a été au moins quatre fois.

Un réquisitoire boiteux
Contrairement au M5-RFP qui veut bâtir son réquisitoire sur des sables mouvants, la CEDEAO a pleinement conscience de sa mission et de la volatilité de la situation. Aussi, a-t-elle prévu une mission présidentielle demain jeudi après avoir promis de mettre ‘’tout en œuvre pour la réalisation effective des mesures proposées et demeurera saisie de la question. Un rapport sera soumis à un prochain Sommet de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de la CEDEOA’’.
D’autre part, c’est surprenant que ce ne soit qu’aujourd’hui que le M5-RFP qui semblait jusqu’ici mésestimer la crise électorale née du contentieux des législatives et qui semblait tout focaliser sur le départ du Président IBK sort aujourd’hui de la besace presque les larmes aux yeux : ‘’la seule solution juridiquement soutenable et politiquement juste reste et demeure la dissolution pure et simple de l’Assemblée nationale’’. Mais solution juridiquement soutenable et politiquement juste à quoi ? A quelle crise ? Avis à la Majorité, Choguel dit que si le Président IBK dissout l’Assemblée nationale le problème serait fini…. !

Pour terminer, autant, le Dr Choguel K. MAIGA, en dépit de tout le respect et l’amitié que notre Rédaction lui a toujours portés, pour y avoir participé sans encore solder les comptes, n’est pas fondé en totale crédibilité et moralité à gloser sur la mauvaise gouvernance, la mal gouvernance, la corruption et les scandales, autant il est révulsif de voir que ceux qui ont envoyé les enfants des autres se faire tuer refuser d’assumer et tenter d’accuser les enfants ds’autres (FORSAT) à leur place.
Tout ce qui reste aujourd’hui au M5-RFP, c’est le verbiage, la diversion pour masquer sa déconfiture et son implosion prochaine. Aussi, dans un baroud d’honneur, il fait dans le charivari politicien et le touche à tout. Comme le dossier Soumi dont ils se sont emparés pour amuser la galerie.
À force de démagogie et de populisme, on veut faire aujourd’hui croire que l’honorable Soumaïla CISSE n’est pas un otage, mais un prisonnier politique dans les geôles du régime. Car, ce qui est arrivé Soumi peut arriver à chacun d’entre nous. En tout cas nous villageois. De grâce, ne faisons pas de l’enlèvement de Soumaïla CISSE un règlement de compte politicien. Une épouse attend son mari, des enfants attendent leur papa… depuis 120 jours ! De grâce ! Unissons-nous autour de ce dossier.

LA RÉDACTION

Info-Matin

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