Mali : Salif Kéïta parle à son “grand-frère” Ibrahim Boubacar Kéïta
De mémoire, il s’est rarement exprimé, voire jamais, sur la politique de son pays. C’est donc une surprise de le voir faire une vidéo sur sa page Facebook pour s’adresser au président du Mali et aborder un sujet aussi sensible que le terrorisme. “Il faut que je parle. Le Mali avant tout”, a-t-il mis comme titre de sa vidéo. Pour qu’il sorte de sa réserve, cela témoigne sans doute de la gravité de la situation.
Sur le ton courtois “d’un petit-frère qui s’adresse à son grand-frère“, Salif Kéita, icône de la musique malienne et africaine, a asséné ses “vérités” au Chef d’Etat malien Ibrahim Boubacar Kéita.
En somme, il assure que ceux qui se font appeler “djihadistes” seraient en réalité de connivence avec la France pour attaquer le Mali. Faisant appel à l’histoire des ancêtres du président Kéïta, notamment le légendaire Soundjata Kéïta, l’auteur du refrain “nous pas bouger” a rappelé que la peur ne devrait pas l’habiter. Et si c’était le cas, qu’il cède le tablier pour que ceux qui “n’ont pas peur” prennent sa place. Et il finit sur un conseil : mieux vaut partir que d’être chassé.
Le sentiment anti-français est de plus en plus exacerbé au Mali. La force française Barkhane qui y est déployée perd chaque jour un peu plus dans son capital sympathie auprès de la population. Voilà une sortie d’une star respectée dans ce pays qui ne va pas arranger les choses.
A noter en rappel que deux récentes attaques terroristes contre des camps militaires maliens ont fait plus d’une cinquantaine de morts au sein des Forces armées maliennes.
Nous vous proposons ci-dessus une traduction de quelques extraits de ses propos tenus en bambara.
https://www.facebook.com/salifkeitafan/videos/533135090616249/
« Je ne suis pas contre toi, je n’ai rien contre toi, mais il faut que je te dise certaines choses… Tu sais pertinemment que c’est la France qui poste des gens pour tuer les Maliens. C’est la France qui paie des gens pour faire ça, pour ensuite faire courir des rumeurs disant qu’il s’agit de djihadistes. Tu sais bien que c’est la France… Mais quand-même tu vas donner ta main à ce (….). Te montrer main dans la main avec lui (le président français Emmanuel Macron, NDLR) pour dire que c’est ton ami. Eh Koro (grand-frère) !
Tout le désordre qui se fait… Ça ne te dérange pas parce que tu es Français, tu as le passeport français. De même que certains artistes dont je tairai le nom (…) Si ça chauffe, ils vont se réfugier là-bas. Mais nous Maliens nous n’avons nulle part d’autre où aller.
Mais tu ne te préoccupes pas de nous. Tu as évité de dire ou faire des choses de peur que la France ne t’enlève de ta place.
Mais mon cher, tu as eu des ancêtres courageux qui n’ont eu peur de rien. Soundjata, par exemple, a été élu. Démocratiquement. Il a même instauré une constitution.
Le poste auquel tu t’accroches … Si tu sais que tu as peur et que tu ne peux pas faire le boulot, rends ta démission et nous trouverons quelqu’un de plus courageux pour t’y remplacer.
Tes enfants dilapident l’argent. Les gens de tes services de sécurité font des anniversaires à coups de centaines de millions… Tout le Mali est fatigué d’eux.
Les Maliens souffrent trop. Les Maliens meurent. Ils en ont marre. Si tu veux t’en rendre compte, va ou envoie tes gens séjourner dans le Nord pour voir si tu pourras fermer l’œil.
Si tu ne te sens pas capable de mener à bien ta fonction, quitte-la et nous trouverons un meilleur remplaçant, qui n’a pas peur. Tout le monde sait que c’est la France qui nous tue.
Tout le monde sait que c’est la France qui nous tue. Koro, démissionner est plus honorable que de se faire chasser. C’est une honte terrible.
. Je suis ton petit-frère et ce sont mes vérités que je te dis là »
Source: burkina24