L’Ecole au centre du Mali : Un enjeu de la crise du centre
Si pour le Vénérable Amadou Hampâté Bah, le delta du Niger avec ses plaines naturellement irrigables, ses bourgoutières garnies d’herbes et ses eaux regorgeant de poissons de toutes espèces et de toute qualité sont un cadeau providentiel offert à l’épanouissement des pêcheurs, des éleveurs et des riziculteurs ; pour l’Etat du Mali cet espace idyllique n’est rien d’autre qu’un no man’s land. Les groupes djihadistes en ont fait un terrain d’imitation des concepts de Sékou Amadou (empire Peuhl du Macina à partir de 1819) puis d’EL Hadj Oumar Tall (à partir de 1862). Les faux héritiers de ces grands conquérants, objecteurs de conscience devant l’éternel, ont vite fait de bannir l’école à l’occidentale.
A l’image de Boko-haram autour du Lac Tchad, les djihadistes imposent depuis plus de trois ans leur vision de l’islam de Diafarabé à Akka. Confortablement installés dans le Toguèrè Koubaye, Toguèrè Mourari, Toguèrè Kotia, près de Dialloubé ou autour du Lac Yonga, ces hordes de hors la loi contrôlent les voies d’eau pendant la crue et autres pistes en période de décrue à la hauteur de ce que auraient fait les forces de police les plus professionnelles.
Pour maitriser les populations, les nouveaux maîtres n’ont pas eu à chercher de midi à quatorze heures. L’aversion de celle-ci pour tout ce qui représente l’état constitue le terreau fertile qui ne demande qu’à être amendé.
Ici, la généralisation de l’école à partir de 1961 n’a pas produit l’effet escompté. Celles qui se sont limitées au premier cycle n’ont presque pas connu de bachelier, voire même de détenteur du DEF. La période des cadeaux contre le retrait du fiston est certes révolue, mais l’affaiblissement de l’autorité de l’état a été exploité au maximum. Les promesses aussi populistes que farfelues tel que l’arrêt des conflits séculaires entre communautés (voir Salalbés contre Sossobé) et/ ou les ventes des bourgoutières par les Djoroos ont fini par convaincre une population lassée par les tergiversations de la justice si ce n’est la flagrance de l’injustice.
A ce cocktail explosif, l’Etat du Mali a répondu par la négligence voir le mépris : pas d’élection communale, pas de présidentielle, de la décrue précoce de 2017 à l’inondation aussi précoce de 2018 les éléments d’une famine certaine sont réunis à l’écho de l’annonce par les Nations Unies d’une crise alimentaire au Centre du pays. Les trois ans de fermetures de certaines écoles et leur transformation en maison de passage des djihadistes en errance (cas de l’école de Ngourèma Toborro) n’émotionnent apparemment grand monde.
Les djihadistes se sont confortablement installés et sont devenus les maîtres des lieux, laissant en proies ces populations à la merci de ces hommes dont l’arme est la seule chose qui leur permet d’imposer leur vision ; car notre Etat du Mali a laissé au bord de la route ces milliers d’enfants à leur propre sort. Bonjour donc les dégâts ! Autre école, autre vision. Pour qui connait l’état de déviance de certaines écoles coraniques dans cette partie de notre territoire et les idées qu’y sont véhiculés d’une part et le discours relayé par les réseaux sociaux des islamistes locaux d’autre part, il y a lieu de revoir la stratégie actuelle de l’offre scolaire de Djenné à Tombouctou, sanctuaire d’antan de la DINA.
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Fakara Fainké
Source: Le Républicain