Faible participation à la révision des listes électorales : Des réformes institutionnelles jugées nécessaires
C’est depuis plus d’un mois que la révision des listes électorales a commencé au niveau des différentes communes du Mali. Mais la mobilisation des citoyens reste faible. Studio Tamani a animé un débat autour de la question, le jeudi dernier, au cours de son émission ‘’Grand dialogue’’.
Le Dialogue national inclusif, l’absence d’appareil pour prendre les photos lors du RAVEC, la reprise des cours, le manque de confiance aux politiques, constituent entre autres des raisons qui expliquent la faible mobilisation des citoyens pour la révision des listes électorales.
Selon Nouhoum Kéita, représentant du SADI, le problème fondamental est le déficit d’information. Pour sa part, dit-il, le SADI envoie chacun de ses membres des lettres circulaires pour les informer de cette révision afin qu’ils partent se recenser.
Cette problématique d’information est reconnue par Fousseyni Diop, membre de l’AJCAD. Selon celui-ci, les informations que donnent les autorités, faisant état de la poursuite des travaux jusqu’au 31 décembre 2019, peuvent prêter à confusion puisque l’essentiel des travaux se limite à la fin du mois d’octobre. Il va plus loin en rappelant que des millions de jeunes n’ont pas pu être inscrits sur les listes électorales lors des élections passées. Ces jeunes qui doivent profiter de cette occasion pour s’inscrire cette année n’auront sûrement pas le temps parce qu’ils sont, pour la plupart, à l’école alors que les travaux se déroulent entre 8 h et 16 h, déplore-t-il. Outre cela, il indique que les travaux, pour rapprocher les commissions de recensement des citoyens, ne sont pas bien organisés. Or, selon Dr Ibrahima Sangho, chef de l’observatoire national des élections, le but de cette révision est non seulement d’insérer ces nouveaux majeurs dans les listes électorales, mais aussi retirer le nom des gens qui sont morts, effectuer des transferts, etc.
Quant aux raisons de la faible mobilisation, Dr Sangho explique que le Dialogue national inclusif qui a fait oublier à beaucoup cette révision ; les partis politiques qui n’ont plus assez de moyens pour sensibiliser leurs représentants, etc. À l’en croire, cette révision constitue un recensement biométrique où l’empreinte et la photo du citoyen sont enregistrées. Ce qu’il déplore à cet effet, c’est que dans certaines localités comme Mopti, il n’existe plus de machine pour photographier. « Cette révision de listes électorales sans le RAVEC est zéro », précise-t-il. Or, la quasi-totalité des majeures possède leur récépissé, mais leur photo n’est pas enregistrée.
Tous ces problèmes, précise M. Diop, relèvent de la responsabilité de l’État qui doit commencer les campagnes de sensibilisation bien avant le jour fatidique. À ses dires, les partis politiques eux aussi ont leur part de responsabilité. Selon le représentant du SADI, le processus de révision de la liste électorale n’est même pas sécurisé. Car rares sont les membres des commissions qui savent comment doit se faire un enrôlement, déplore-t-il avant de préciser que tous ceux-ci constituent des obstacles pour une large participation à cette révision.
Selon le membre de l’AJCAD, pendant ce temps, les partis politiques sont plutôt dans des luttes d’intérêts et s’intéressent peu à cette révision puisqu’aucun d’entre eux ne sort pour sensibiliser les citoyens. Or, c’est ce qu’ils devraient faire. Ce travail est un préliminaire essentiel pour éviter les fraudes lors des élections, prévient-il. « Les enfants n’ont plus confiance aux partis politiques », déplore-t-il.
Pour Diop, les partis ne doivent pas s’intéresser uniquement à leurs membres, mais à tous les citoyens lors des sensibilisations. À ses dires, « Il est temps que les fichiers soient informatisés ». De nos jours, il est déplorable que ces fichiers soient écrits à la main. De son côté, M. Sangho suggère pour sortir des fraudes électorales, des réformes institutionnelles. Une proposition partagée par tous les autres débatteurs. Il doit y avoir un registre de mort dans toutes les commissions de recensement. Mais rares sont les commissions qui en ont, déplore-t-il. Pour améliorer le RAVEC, il convient de délocaliser l’enrôlement aux mairies, a-t-il suggéré. Pour informer les nouveaux majeurs de ce processus de révision, il faut passer les informations via les réseaux sociaux puisque la plupart d’entre eux sont sur ces réseaux. Selon M. Kéita, parlant de la société civile, qui est un contre-pouvoir, la plupart des membres de cette organisation ne fait pas son travail. Quant aux partis politiques, il affirme : « Les partis politiques sont devenus des lieux de business ». C’est pourquoi les citoyens n’ont plus confiance en ces partis.
Pour M. Diop, il est temps que chaque acteur du processus électoral s’auto-évalue pour l’amélioration du taux de participation.
Fousseni TOGOLA
Source : LE PAYS