Crise humanitaire : Plus de 4 millions de personnes menacées d’insécurité alimentaire
Plus d’un malien sur quatre seront confrontés à une insécurité alimentaire durant la période de soudure cette année. C’est ce qui ressort du dernier rapport d’OCHA rendu public la semaine dernière sur la situation de l’insécurité alimentaire. Selon la coordination de l’action humanitaire, le Nord, le Centre du pays et la région Koulikoro seront les plus touchées.
Dans ce rapport de situation, OCHA annonce que année, 4,3 millions de personnes ont besoin d’assistance humanitaire ; soit une augmentation de 1,1 million de personnes comparativement à l’année dernière à la même période. Cette hausse est due essentiellement à la persistance des conflits et aux aléas climatiques défavorables. Sans financement suffisant et à temps, la crise deviendra encore plus difficile à contenir.
En effet, la situation alimentaire du Mali s’est détériorée par rapport à l’année dernière selon les résultats de l’analyse du Cadre Harmonisé (CH) de novembre 2019. Entre octobre et décembre 2019, environ 3,6 millions de personnes étaient en situation d’insécurité alimentaire, dont près de 650 000 en insécurité alimentaire sévère* et avaient besoin d’une assistance alimentaire d’urgence. A titre comparatif, 185 000 personnes étaient en insécurité alimentaire sévère à la même période en 2018.
Ainsi, le CH prévoit que durant la période de soudure de juin à août 2020, près de 4,9 millions de personnes seront en situation de risque ou d’insécurité alimentaire dont 1,1 million en phase sévère. Ces chiffres représentent le niveau le plus élevé au cours des cinq dernières années.
Selon le rapport de Ochoa l’analyse des besoins révèle que cette année, environ 4,3 millions de personnes -dont 75 pour cent de femmes et d’enfants- ont besoin d’assistance humanitaire dans le pays. Ce chiffre est en augmentation de 1,1 million de personnes par rapport à janvier 2019. Cette hausse se justifie par un surplus de personnes dans le besoin dans six secteurs sur sept en raison de la persistance des conflits dans le nord et de leur extension dans de nouvelles zones au centre du pays accroissant ainsi les besoins dans les secteurs des abris, de l’eau, l’hygiène et l’assainissement, de l’éducation, de la nutrition, de la protection et de la santé. Cependant, il est à préciser que dans le secteur de la sécurité alimentaire, l’évolution du nombre de personnes dans le besoin doit être comprise au niveau qualitatif (c’est-à-dire par rapport au nombre de personnes touchées par l’insécurité alimentaire sévère).
Si la population dans le besoin est légèrement en baisse dans ce secteur, il se révèle une hausse de 800 000 personnes en besoins immédiats d’assistance alimentaire (population en phases 3 et 4 du CH). En effet, en janvier 2019, environ 415 800 personnes (cadre harmonisé novembre 2018) avaient besoin d’une assistance immédiate contre 1,1 million de personnes à la même période en 2020 (cadre harmonisé novembre 2019).
Plus de 78 pour cent des personnes dans le besoin en 2020 vivent dans les régions de Mopti (1,5 million de personnes ou 55 pour cent de la population régionale), de Tombouctou (692 000 personnes ou 74 pour cent de la population régionale), de Gao (685 000 personnes ou 91 pour cent de la population régionale) et de Ségou (500 000 personnes ou 15 pour cent de la population régionale) toutes situées au nord ou au centre du pays. Les 10 pour cent de personnes restantes vivent dans les régions de Kayes, Koulikoro, Sikasso, Kidal et dans le district de Bamako.
Aussi, l’accès humanitaire reste complexe en raison de l’insécurité dans certaines localités au centre et au nord du pays et plus particulièrement dans les zones le long des frontières avec le Niger et le Burkina Faso (Liptako Gourma). Les principales contraintes d’accès sont dues aux hostilités entre les groupes armés, aux tensions intercommunautaires, à la présence d’engins explosifs improvisés et à la criminalité grandissante.
Dans les zones à haut risque sécuritaire, l’accès des acteurs humanitaires aux populations affectées et des populations civiles aux services sociaux de base ainsi qu’aux moyens de subsistance est également rendu difficile par les contraintes sécuritaires précitées.
Malgré les difficultés d’accès, les interventions humanitaires se poursuivent et sont parfois menées par les organisations locales et nationales qui travaillent en partenariat avec des ONG internationales et des agences des Nations Unies. C’est le cas, par exemple, dans les zones rurales de N’tilit, Tessit et Ouatagouna (région de Gao), Niafounké, Diré, et Gossi (région de Tombouctou) et toute la zone au Sud-Est de Ménaka y compris certaines zones de Douentza.
Les incidents sécuritaires ont été un handicap sérieux dans l’accès à l’aide humanitaire. Ainsi, l y a eu 180 cas d’actes de banditisme visant les ONG répertoriés en 2019 selon les données de l’INSO (International NGO Safety Organisation). L’année dernière, 194 incidents liés aux engins explosifs improvisés (EEI) ont été notifiés. Ces incidents ont fait 216 victimes civiles -dont 79 civils tués-. La région de Mopti a enregistré 93 pour cent des victimes. S’agissant des incidents de protection, 1 882 cas ont été rapportés par le monitoring de protection en 2019 contre 1 025 en 201 ; soit une augmentation de 45%.
Mémé Sanogo
L’Aube