Réformes, refondation et transition : Un mandat présidentiel à Choguel ?
A l’entendre lors de ses sorties (il ne se prive pas de parler), le Premier ministre de Transition, Dr Choguel Kokalla Maïga, a visiblement besoin d’un mandat présidentiel pour…lancer le Malikura.
Le chef de l’Etat, le Colonel Assimi Goïta est plutôt discret. Et difficile donc de connaître toutes ses intentions. Ce n’est pas le cas du chef du gouvernement, un politique avisé, qui a plus d’un tour dans sa gibecière.
Dans sa sortie la semaine dernière à Ségou, lors de la cérémonie de clôture du Forum national sur l’entrepreneuriat des jeunes et des femmes en milieu rural, le Premier ministre de transition, Dr Choguel Kokalla Maïga a indiqué que les réformes, qu’il souhaite, doivent faire du Mali en Etat vertueux. Ambition louable ! Sauf qu’en démocratie, de telles ambitions meublent un projet de société en bonne et due forme. Lequel projet de société est proposé au peuple souverain lors d’une élection présidentiel. Et c’est lorsque ledit projet de société et son porteur, le candidat convainquent le peuple que celui-ci lui accorde son vote et le porte à la magistrature suprême du pays.
Pourquoi alors Dr Choguel Kokalla Maïga, qui a de si belles idées de réformer la gouvernance du Mali et en faire rapidement un Etat vertueux, a-t-il accepté de devenir Premier ministre de Transition ? Ses détracteurs diront même qu’il s’est battu de toutes ses forces pour occuper ce poste. Ce choix ne le prive-t-il pas à brève échéance de mettre en œuvre son véritable programme de gouvernement ? Puisque Choguel Maïga ne peut pas être candidat à la prochaine élection présidentielle, alors que l’homme veut changer le Mali…
En effet, à le croire, les réformes qu’envisage son Gouvernement « vont au-delà des aspects cosmétiques » de la gestion du pays. « Elles ne se limitent pas au seul besoin de relecture des textes fondamentaux de la République », déclarait-il le 13 novembre dernier à Ségou. Et le chef du gouvernement de souligner avec conviction : « Elles (ces réformes) concernent tous les fondements de notre société et tous les secteurs : Armée, école, santé, foncier, gouvernance, lutte contre la corruption et l’impunité, etc. Leur finalité est de repositionner le Mali sur une dynamique vertueuse, à travers des institutions fortes et légitimes à même d’assurer sa stabilité durable ».
Pour des réformes d’une telle envergure, qui touchent autant de secteurs de la vie nationale, l’on est tenté de dire que le locataire de la primature voudrait gérer le pays durant au moins un mandat présidentiel, soit au moins 5 ans. Le leader du parti MPR n’avait pas pu se faire élire à Koulouba pour changer le Mali. Mais, comme l’occasion fait le larron, il voudrait prouver aux Maliens de quoi il est capable en termes de gouvernance refondatrice. Il ne reste qu’à lui donner le temps nécessaire… Un an déjà, plus deux autres années ? Trois ans ? Un mandat présidentiel ? Pourquoi pas ! Aucun sacrifice n’est de trop quand c’est pour aller au Malikura. Ce que les chefs traditionnels et coutumiers sont venus dire de vive voix à Bamako, la semaine dernière ; s’offrir 10 ans de Transition ?
En outre, que devient le programme de gouvernement du prochain président de la République du Mali, celui-là qui sera élu par le peuple malien à l’issue de la présidentielle à venir ? Devra-t-il mettre son programme au placard, parce que le Premier ministre de Transition aura déjà fait adopter des axes de « réformes majeures »? Ne pourra-t-il pas remettre en cause des réformes qui n’auront pas son adhésion ? Pourtant le principe du parallélisme des formes pousse à juste voter des lois contraires à celles qui auront imposé des pratiques nouvelles que le nouveau principe du jour n’épouserait pas. Dommage que Choguel est lui droit dans ses bottes et ce qu’il veut s’impose!
Et, par rapport à la polémique sur la prolongation de la transition, Dr Choguel Kokalla Maïga se montre porte-parole du peuple malien. « Qu’on dise à tout le monde que c’est aux Maliens de décider de leur sort ! Personne d’autre ne décidera de notre sort à notre place. Je reste droit dans mes bottes », a-t-il martelé. Comme quoi ce que le peuple veut, Choguel le veut !
Kassoum TOGO
Mali Horizon