Affaire de tentative de coup d’État: l’ONU demande l’abandon des poursuites contre Ras Bath et ses coaccusés
Les poursuites engagées contre le journaliste Ras Bath et ses coaccusés et leur maintien en détention ne sont ni plus ni moins que du harcèlement judiciaire sur fond d’instrumentalisation politique, tel est le verdict des experts de l’ONU sur cette affaire dite de tentative de déstabilisation des institutions de la Transition. Selon un communiqué du Haut-commissariat des droits de l’homme des Nations-Unies publié ce jeudi 8 avril à Genève, les arrestations du journaliste Mohamed Youssouf BATHILY, connu sous le nom de Ras Bath, ainsi que de Vital Robert DIOP, Souleymane KANSAYE, Mahamadou KONE et Aguibou Macky TALL ont été effectuées sans l’implication d’aucune autorité judiciaire et en dehors de tout cadre légal.
Pour les trois experts de l’ONU commis sur cette affaire, au lieu de s’acharner sur un pauvre journaliste et d’inoffensifs fonctionnaires de l’État, les autorités maliennes et la justice du pays devraient faire « preuve de la même diligence et de la même détermination pour poursuivre ou punir les auteurs présumés de graves violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits, dont certains pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité comme le souligne, par exemple, le rapport de la Commission d’enquête internationale pour le Mali de juin 2020 ». Ce que les experts exigent des autorités de notre pays, l’abandon des poursuites contre Ras Bath et ses coaccusés et le respect scrupuleux des obligations pertinentes du Mali en matière de droits de l’homme. Voici le communiqué du Haut-commissariat des droits de l’homme des Nations-Unies publié ce jeudi 8 avril à Genève.
GENÈVE (8 avril 2021) – Des experts de l’ONU ont déclaré aujourd’hui qu’ils étaient alarmés par le maintien en détention d’un journaliste et de quatre hauts fonctionnaires et ont exhorté les autorités à abandonner immédiatement les poursuites engagées contre eux, conformément à l’ordonnance rendue le mois dernier par la Cour d’appel de Bamako qui a prononcé l’annulation des procédures et ordonné la mise en liberté de ces cinq hommes.
L’expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Mali, la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression et le Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats ont déclaré que les arrestations en décembre 2020 du journaliste Mohamed Bathily, connu sous le nom de Ras Bath, ainsi que de Vital Robert Diop, Souleymane Kansaye, Mahamadou Koné et Aguibou Macky Tall – tous travaillant pour des institutions publiques et parapubliques – ont été effectuées sans l’implication d’aucune autorité judiciaire et en dehors de tout cadre légal.
«Pendant leur detention à la Direction Générale de la sécurité d’Etat, qui n’est pas habilitée à détenir des suspects, les cinq personnes auraient été detenues au secret sans pouvoir contacter leur famille, ni avoir accès à un médecin ou à un avocat «, ont déclaré les experts.
«Après leur transfert aux autorités judiciaires, les cinq personnes ont fait l’objet d’une information judiciaire pour complot contre le gouvernement, association de malfaiteurs, offense à la personne du chef de l’État et complicité de ces faits. L’ancien Premier ministre Boubou Cissé était accusé des mêmes faits, serait en train de vivre dans la clandestinité et l’on ignore où il se trouve.»
Après l’annulation des procédures par la Cour d’Appel de Bamako le 2 mars, le procureur général du Mali a contesté la décision et s’est pourvu en cassation.
Il existerait des motivations à connotation politique dans le traitement réservé à cette affaire tel qu’illustré notamment par les violations alléguées des procédures régulières; la décision prise par le Ministre de la Justice, le 23 février 2021 de muter les juges chargés du dossier vers d’autres fonctions quelques jours après la recommandation de l’avocat général auprès de la Cour d’Appel d’abandonner les poursuites faute de preuves, le 16 février 2021; l’annulation des procédures par la Cour d’Appel de Bamako, le 2 mars 2021, faute de preuves ainsi que le maintien en détention de cinq personnes. Il s’agit des violations manifestes qui dénotent l’existence d’une détention arbitraire », ont déclaré les experts.
Selon eux, les poursuites engagées contre le journaliste Bathily et ses coaccusés et leur maintien en détention pourraient s’apparenter à du harcèlement judiciaire. «Ceci, en particulier dans un contexte où les autorités maliennes et la justice du pays n’ont pas toujours fait preuve de la même diligence et de la même détermination pour poursuivre ou punir les auteurs présumés de graves violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits, dont certains pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité comme le souligne, par exemple, le rapport de la Commission d’enquête internationale pour le Mali de juin 2020», ont déclaré les experts.
«Nous exhortons les autorités maliennes à abandonner les poursuites et insistons sur le respect scrupuleux des obligations pertinentes du Mali en matière de droits de l’homme», a souligné l’expert.
Les experts ont également fait part de leurs préoccupations directement au gouvernement du Mali. FIN
Info-Matin