L’exclusion de la France de l’Aukus en Indopacifique « est une gifle »
Joe Biden a écarté la France d’une nouvelle coalition militaire dans le Pacifique. Pour Simon Serfaty, professeur de politique étrangère américaine, Paris devrait se recentrer sur l’Europe, explique-t-il au micro de Rachel Marsden.
Paris a été exclue de la nouvelle alliance entre les États-Unis, l’Australie, et la Grande-Bretagne –l’Aukus–, montée pour contrer militairement la Chine.
En conséquence, Canberra a dénoncé son accord de défense avec la France comprenant l’achat de 12 sous-marins pour une valeur de 56 milliards d’euros, en faveur d’une alternative américaine. Joe Biden savait évidemment que la réaction du coq français se résumerait à quelques accès de colère et en effet, malgré la fureur initiale de Paris, les mers semblent déjà plus calmes.
Simon Serfaty, professeur de politique étrangère américaine à l’université du Old Dominion à Norfolk (Virginie), revient pour Spuntik sur l’impact du revirement sur le dossier sous-marins.
« Pour la France, c’est une gifle parce que cette décision aurait dû être communiquée aux Français et aurait dû mener à une discussion stratégique importante. »
Dans une déclaration commune faisant suite à un appel téléphonique entre Macron et Biden, les États-Unis « reconnaissent l’importance d’une défense européenne plus forte et plus capable, qui contribue positivement à la sécurité globale et transatlantique et est complémentaire à l’Otan« . Si l’on décrypte le langage diplomatique, il semble que les États-Unis concèdent à la France un rôle de supplétif de ses opérations militaires par le biais de l’Otan.
« L’administration Biden reste pro Europe et voit encore dans la France son meilleur allié européen aujourd’hui. Faute de mieux, certes, puisque le Royaume-Uni est sorti de l’Europe et que l’Allemagne est à la dérive, « italianisée ». »
Le professeur recommande que la France se recentre vers l’Europe:
« La France, à elle seule, a un poids limité. La France s’exprime mieux à travers un ensemble européen qui est beaucoup plus puissant et peut ajouter à la capacité des États occidentaux à s’exprimer dans la région de l’Asie-Pacifique. On en revient toujours au même thème quand on parle des affaires bilatérales entre les États-Unis et la France: pour refaire l’alliance, il faut refaire l’Europe. Il faut faire une Europe plus autonome, plus capable, plus unie. »
Serfaty explique que, de toute façon, malgré la nouvelle alliance militaire anglo-saxonne qui vise la Chine, l’idée d’une guerre conventionnelle entre les deux pays est caduque:
« Au XXIe siècle, les guerres entre les superpuissances –les États-Unis, la Chine, la Russie, l’Europe–, c’est fini, c’est révolu. Je pense que Biden veut seulement muscler un peu le pivotement vis-à-vis de la Chine. Par ailleurs, on exagère la puissance de cette dernière. C’est une puissance montante mais elle a encore besoin de temps. »
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